Les couples de femmes en parcours AMP peuvent vouloir recourir à la méthode ROPA (Réception d’Ovocytes issus de la Partenaire). Une femme donne ses gamètes à sa partenaire tandis que l’autre femme porte la grossesse.
La loi française ne fait pas explicitement mention d’une interdiction de la méthode ROPA. Cependant, l’Agence de la biomédecine ne l’autorise pas en France.
La raison invoquée est que la femme qui donne ses gamètes à sa partenaire est assimilée à une donneuse de gamètes. La loi impose le principe d’anonymat au don de gamètes, ce qui signifie qu’il n’est pas possible de faire un don dirigé. Dès lors, il n’est pas possible qu’une femme soit donneuse de gamètes en demandant que ce soit exclusivement sa partenaire qui bénéficie de son don d’ovocytes.
L’association GIAPS a attaqué l’interdiction de la méthode ROPA devant le Conseil d’Etat. Celui-ci a rendu sa décision n°472649 le 19 juin 2024 (télécharger la décision).
Extrait de la décision du Conseil d’Etat :
7. Aux termes de l’article L. 1211-5 du code de la santé publique : » Le donneur ne peut connaître l’identité du receveur, ni le receveur celle du donneur. Aucune information permettant d’identifier à la fois celui qui a fait don d’un élément ou d’un produit de son corps et celui qui l’a reçu ne peut être divulguée. / Il ne peut être dérogé à ce principe d’anonymat qu’en cas de nécessité thérapeutique « . Selon l’article L. 1244-7 de ce code : » Le bénéfice d’un don de gamètes ne peut en aucune manière être subordonné à la désignation par le couple receveur d’une personne ayant volontairement accepté de procéder à un tel don en faveur d’un couple tiers anonyme. / La donneuse d’ovocytes doit être particulièrement informée des conditions de la stimulation ovarienne et du prélèvement ovocytaire, des risques et des contraintes liés à cette technique, lors des entretiens avec l’équipe médicale pluridisciplinaire. Elle est informée des conditions légales du don, notamment du principe d’anonymat et du principe de gratuité (…) « . L’article L. 2141-2 du même code dispose que : » (…) Tout couple formé d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ou toute femme non mariée ont accès à l’assistance médicale à la procréation (…) Lorsqu’un recueil d’ovocytes par ponction a lieu dans le cadre d’une procédure d’assistance médicale à la procréation, il peut être proposé de réaliser dans le même temps une autoconservation ovocytaire « . En vertu de l’article L. 2141-12 du même code : » I.- Une personne majeure qui répond à des conditions d’âge fixées par un décret en Conseil d’Etat, pris après avis de l’Agence de la biomédecine, peut bénéficier, après une prise en charge médicale par l’équipe clinicobiologique pluridisciplinaire, du recueil, du prélèvement et de la conservation de ses gamètes en vue de la réalisation ultérieure, à son bénéfice, d’une assistance médicale à la procréation dans les conditions prévues au présent chapitre. (…) / II.- La personne dont les gamètes sont conservés en application du I du présent article est consultée chaque année civile. Elle consent par écrit à la poursuite de cette conservation. / Si elle ne souhaite plus poursuivre cette conservation ou si elle souhaite préciser les conditions de conservation en cas de décès, elle consent par écrit : / 1° A ce que ses gamètes fassent l’objet d’un don en application du chapitre IV du titre IV du livre II de la première partie du présent code ; / 2° A ce que ses gamètes fassent l’objet d’une recherche dans les conditions prévues aux articles L. 1243-3 et L. 1243-4 ; / 3° A ce qu’il soit mis fin à la conservation de ses gamètes. / (…) En cas de décès de la personne et en l’absence du consentement prévu aux mêmes 1° ou 2°, il est mis fin à la conservation des gamètes « . Enfin, le premier alinéa de l’article 16-3 du code civil prévoit qu' » il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui « .
8. Il découle nécessairement de la combinaison de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption de la loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique par laquelle l’accès à l’assistance médicale à la procréation a été ouvert, sans que soit maintenue la condition qui prévalait antérieurement de l’infertilité du couple ou d’un risque de transmission d’une maladie d’une particulière gravité, à tout couple formé d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ou toute femme non mariée, qu’eu égard au principe d’anonymat du don d’ovocyte et à la circonstance qu’un prélèvement d’ovocytes ne peut avoir d’autre finalité qu’un don anonyme lorsqu’il n’est pas destiné à la réalisation d’une assistance médicale à la procréation au bénéfice de la personne prélevée, et alors même qu’elle n’est pas expressément interdite par la loi, la pratique de la ROPA n’est pas autorisée en France. Par suite, l’Agence de la biomédecine, en faisant état sur son site internet de l’absence d’autorisation en France de cette pratique, n’a pas donné une interprétation erronée du droit positif, alors même qu’ainsi que le soutient l’association, aucune autre disposition ne s’y opposerait et, en particulier, qu’une telle pratique ne pourrait être regardée comme une gestation pour le compte d’autrui, que prohibe l’article 16-7 du code civil.
L’article 342-9 du code civil énonce : « En cas d’assistance médicale à la procréation nécessitant l’intervention d’un tiers donneur, aucun lien de filiation ne peut être établi entre l’auteur du don et l’enfant issu de l’assistance médicale à la procréation. »
La QPC 2023-1053 du 9 juin 2023 avait pour objectif de déterminer si l’article 342-9 du code civil interdisait l’établissement d’un lien de filiation entre un enfant issu d’un don et le donneur de gamètes au moyen d’une adoption. Le Conseil Constitutionnel a estimé que ce n’était pas à lui de se prononcer sur cette question.
Extrait de la décision : « 11. En l’espèce, aucune interprétation jurisprudentielle constante ne confère, en l’état, aux dispositions contestées une portée qui exclurait la possibilité, pour le tiers donneur, d’établir un lien de filiation adoptive avec une personne issue de son don. »
La CEDH a rendu un arrêt le 12 novembre 2024 qui semble indiquer que dans le cas d’une ROPA, la femme qui donne ses gamètes à sa compagne, peut établir un lien de filiation avec l’enfant au moyen d’une adoption.