[Registre des dons] Modalités de conservation des données

1. Conservation des données dans le registre

Les données relatives aux bénéficiaires du don, les personnes issues d’un don et les tiers donneurs peuvent être conservées dans le registre pour une durée pouvant aller jusqu’à 120 ans. On peut donc en déduire que pour chaque personne inscrite dans le registre, il doit être fait mention de la date d’inscription afin de pouvoir déterminer la date à laquelle les données seront détruites.

Les données du registre sont conservées par l’Agence de la biomédecine dans des conditions garantissant strictement leur sécurité, leur intégrité et leur confidentialité.

Ce registre tenu par l’Agence de la biomédecine permet la mise en œuvre d’une mission d’intérêt public. Le RGPD permet dans le cas d’un traitement destiné à la mise en œuvre d’une mission d’intérêt public une plus grande souplesse dans le traitement des données personnelles. C’est ce qui va par exemple permettre d’ajouter dans le registre l’identité de personnes n’ayant pas consenti à la conservation et au traitement de leurs données personnelles.

Recours contre le 1° de l’article R. 2143-1 du code de la santé publique

Cet article explique les enjeux associés au 1° de l’article R. 2143-1 du code de la santé publique.

1. La loi relative à la bioéthique du 2 août 2021
Pour comprendre le recours, il faut tout d’abord évoquer les nouveautés de la loi.

a) La loi a ouvert l’AMP aux couples de femmes et aux femmes célibataires.
b) La loi autorise le double don de gamètes. Cela signifie qu’une femme célibataire ayant un problème d’infertilité pourra bénéficier d’un don de spermatozoïdes et d’ovocytes.
c) La loi instaure un droit d’accès aux origines pour les personnes issues d’un don.

L’article L2143-1 du code de la santé publique définit le tiers donneur de la manière suivante : « Pour l’application du présent chapitre, la notion de tiers donneur s’entend de la personne dont les gamètes ont été recueillis ou prélevés en application du chapitre IV du titre IV du livre II de la première partie du présent code ainsi que du couple, du membre survivant ou de la femme non mariée ayant consenti à ce qu’un ou plusieurs de ses embryons soient accueillis par un autre couple ou une autre femme en application de l’article L. 2141-5. »

La définition du tiers donneur implique que dans le cas où un couple de femmes ou une femme célibataire en parcours AMP bénéficierait d’un double don de gamètes et déciderait ensuite de faire don de ses embryons surnuméraires, les personnes issues de ce don d’embryons pourront connaître l’identité des personnes ayant fait don de ces embryons surnuméraires mais ne pourront pas connaître l’identité des donneurs de gamètes (c’est-à-dire leurs géniteurs). Cependant, il est relativement rare que les couples de femmes et les femmes célibataires aient besoin d’un double don de gamètes et dans la majorité des cas, seul un don de spermatozoïdes sera nécessaire aux couples de femmes et femmes célibataires en parcours AMP. Cela signifie qu’avec la définition du tiers donneur, sauf rare exception, les personnes issues de dons d’embryons pourront connaître l’identité de leur génitrice (la bénéficiaire du don de spermatozoïdes) mais pas celle du donneur de spermatozoïdes.

Durant l’examen du projet de loi, certains parlementaires se sont émus que les personnes qui seront issues d’un don d’embryons surnuméraires ne pourront pas connaître l’identité du donneur de spermatozoïdes. Des parlementaires ont donc déposé des amendements pour remédier à cette lacune et permettre que les personnes issues d’un don d’embryons aient bien accès à l’identité des donneurs de gamètes.

La députée Mme Blandine Brocard avait par exemple déposer l’amendement suivant :

Durant l’examen du projet de loi bioéthique, le gouvernement s’est systématiquement opposé aux amendements permettant aux personnes issues d’un don d’embryons d’avoir également accès à l’identité du donneur de gamètes. Les amendements mis au vote ont été rejetés.

2. Le décret du 25 août 2022

Le gouvernement a publié un décret le 25 août 2022 pour mettre en place le droit d’accès aux origines et qui a modifié la définition du tiers donneur.

Article R. 2143-1 du code de la santé publique : « 1° Lorsque le ou les embryons mentionnés au premier alinéa de l’article L. 2143-1 ont été conçus grâce à un don de sperme, un don d’ovocyte ou un don de sperme et un don d’ovocyte, la notion de tiers donneur s’entend de la ou des personnes ayant consenti à ces dons de gamètes ainsi que du couple, du membre survivant ou de la femme non mariée ayant consenti à l’accueil de ses embryons en application de l’article L. 2141-5 ; »

Avec cet article, les personnes issues d’un don d’embryons qui exerceront leur droit d’accès aux origines pourront connaître l’identité de leurs géniteurs. Cet article est donc un progrès pour les personnes issues d’un don d’embryons qui exerceront leur droit d’accès aux origines.

Cet article présente également l’avantage de réduire le risque de consanguinité. En effet, la loi limite à 10 le nombre de naissances issues d’un donneur de gamètes mais jusqu’à présent, seules les naissances directement issues du don de gamètes étaient prises en considération. Cela signifie que si un couple faisait don de ses embryons surnuméraires conçus grâce à un don de gamètes, les éventuelles naissances issues de ce don d’embryons n’étaient pas prises en considération dans le nombre de naissances permises par le donneur de gamètes.

3. Les conséquences pour les couples de femmes et femmes célibataires ayant des embryons surnuméraires

La loi offre 2 possibilités pour les personnes possédant des embryons surnuméraires :
– En faire don
– Les détruire (cela peut se faire de manière ou de manière indirecte en autorisant qu’ils soient utilisés dans le cadre de recherches médicales)

La loi relative à la bioéthique prévoit qu’à partir du 1er septembre 2022, les dons de gamètes et d’embryons ne soient autorisés qu’à la condition que les donneurs consentent à la communication de leur identité et de données non directement identifiantes aux personnes issues de leur don. Cela signifie que si un couple de femmes ou une femme célibataire veut faire don de ses embryons surnuméraires, cela ne leur sera autorisé qu’à la condition que le donneur de spermatozoïdes ait consenti à la communication de son identité.

Article L2143-2 du code de la santé publique : « Toute personne conçue par assistance médicale à la procréation avec tiers donneur peut, si elle le souhaite, accéder à sa majorité à l’identité et aux données non identifiantes du tiers donneur définies à l’article L. 2143-3.
Les personnes qui souhaitent procéder à un don de gamètes ou proposer leur embryon à l’accueil consentent expressément et au préalable à la communication de ces données et de leur identité, dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article. En cas de refus, ces personnes ne peuvent procéder à ce don ou proposer cet accueil. »

La loi prévoit cependant une période transitoire pendant laquelle les centres de don peuvent continuer à utiliser les gamètes provenant de donneurs ancien régime.

L’article 4 du décret n° 2022-1187 du 25 août 2022 est le suivant : « I. – Jusqu’à la date fixée par le décret prévu au C du VII de l’article 5 de la loi du 2 août 2021 susvisée, les organismes ou établissements de santé mentionnés au troisième alinéa de l’article L. 2142-1 du code de la santé publique attribuent en priorité les gamètes donnés et les embryons proposés à l’accueil avant le 1er septembre 2022, dans le respect des règles d’attribution des gamètes prévues à l’article L. 1418-1 du même code »

L’article 1 du décret n° 2023-785 du 16 août 2023 est le suivant : « La date à compter de laquelle ne peuvent être utilisés pour une tentative d’assistance médicale à la procréation que les gamètes et les embryons proposés à l’accueil pour lesquels les donneurs ont consenti à la transmission de leurs données non identifiantes et à la communication de leur identité en cas de demande des personnes nées de leur don est fixée au 31 mars 2025. »

Cela signifie que jusqu’au 31 mars 2025, les centres de don doivent en priorité utiliser les gamètes dont les donneurs n’ont pas consenti à la communication de leur identité.

Certaines personnes accordent une valeur particulière aux embryons et cela peut donc être un déchirement d’être contraint de détruire ses embryons surnuméraires du fait qu’il n’a pas été possible d’en faire don car le tiers donneur de gamètes n’a pas consenti à la communication de son identité.

Il existe également le risque que le don d’embryons surnuméraires ne soit pas autorisé si le donneur de spermatozoïdes ayant permis la création des embryons a permis 10 naissances. En effet, s’il était autorisé que le couple de femmes ou la femme célibataire fasse don de ses embryons surnuméraires alors que le donneur de spermatozoïdes a déjà permis 10 naissances, cela pourrait aboutir à ce que le donneur de spermatozoïdes dépasse le nombre de naissances autorisées par la loi.

4. Le recours devant le Conseil d’Etat

Quelqu’un a fait un recours devant le Conseil d’Etat afin de faire annuler le 1° de l’article R. 2143-1 du code de la santé publique ou à défaut, de suspendre son application jusqu’au 1er janvier 2027. L’objectif de ce recours est d’éviter de se retrouver dans une situation où un couple de femmes ou une femme célibataire se verrait refuser la possibilité de faire don de ses embryons surnuméraires au motif que le donneur de gamètes n’a pas consenti à la communication de son identité aux personnes issues de ses dons.

Plusieurs arguments sont donnés par demander l’annulation de cette disposition.

Motif 1 :
Les embryons bénéficient d’une protection juridique particulière en raison de leur humanité et du principe de dignité qui leur est applicable. Il convient donc d’éviter de privilégier leur don plutôt que de les détruire.

Motif 2 :
Durant les débats du projet de loi bioéthique, les parlementaires ont voté contre cette disposition.

Motif 3 :
L’article R. 2143-1 du CSP a été publié au Journal Officiel du 27 août 2022 pour une entrée en vigueur dès le 1er septembre 2022. Le gouvernement n’avait pas communiqué en amont sur le fait qu’il modifierait avec son décret la notion de tiers donneur. Le fait qu’il y ait moins d’une semaine entre la publication de l’article et son entrée en vigueur a pour conséquence que les couples ayant des embryons surnuméraires conçus grâce à un don de gamètes n’ont pas disposé d’un délai raisonnable pour s’adapter et effectuer le don de leurs embryons avant le 1er septembre 2022. C’est au nom du principe de sécurité juridique que le Conseil d’Etat a censuré la mise en œuvre trop précipitée de la réforme de la procédure civile, intervenue en décembre 2019 pour une entrée en vigueur dès janvier 2020 (CE, N° 436939 du 22 septembre 2022).

Dès le 1er avril 2025, les centres de don n’utiliseront plus que des gamètes dont le donneur a consenti à la communication de son identité. Cela signifie qu’il n’y aura plus d’obstacle à faire don des embryons surnuméraires conçus après le 31 mars 2025. C’est la raison pour laquelle, cela qui a fait son recours proposait à défaut d’annuler l’article, de simplement le suspendre jusqu’au 1er janvier 2027.

5. L’avis du rapporteur public

Le Conseil d’Etat va donc devoir se prononcer sur un article qui d’un côté favorise le droit d’accès aux origines pour les personnes issues d’un don d’embryons mais qui d’un autre côté, rend incertain la possibilité pour les bénéficiaires de l’AMP avec tiers donneur de pouvoir faire don de leurs embryons surnuméraires. Il convient donc de mettre en balance les droits des différentes parties impliquées.

L’audience s’est tenue le 17 mai 2024. Le rapporteur public a appelé au rejet du recours. Dans son argumentaire, il explique que la loi relative à la bioéthique du 2 août 2021 instaure un droit d’accès aux origines pour les personnes issues d’un don et qu’en conséquence, cet article est nécessaire.

6. La décision du Conseil d’Etat

Dans sa décision n° 467271 et n° 467467 du 31 mai 2024, le Conseil d’État a rejeté le recours.

Extrait de la décision : « 9. Aux termes de l’article L. 2143-1 du code de la santé publique : « Pour l’application du présent chapitre, la notion de tiers donneur s’entend de la personne dont les gamètes ont été recueillis ou prélevés en application du chapitre IV du titre IV du livre II de la première partie du présent code ainsi que du couple, du membre survivant ou de la femme non mariée ayant consenti à ce qu’un ou plusieurs de ses embryons soient accueillis par un autre couple ou une autre femme en application de l’article L. 2141-5. / Lorsque le tiers donneur est un couple, son consentement s’entend du consentement exprès de chacun de ses membres ». Aux termes de l’article L. 1244-4 du même code : « Le recours aux gamètes d’un même donneur ne peut délibérément conduire à la naissance de plus de dix enfants ».

10. Aux termes des deux premiers alinéas de l’article R. 2143-1 du même code : « Pour l’application du présent chapitre : / 1° Lorsque le ou les embryons mentionnés au premier alinéa de l’article L. 2143-1 ont été conçus grâce à un don de sperme, un don d’ovocyte ou un don de sperme et un don d’ovocyte, la notion de tiers donneur s’entend de la ou des personnes ayant consenti à ces dons de gamètes ainsi que du couple, du membre survivant ou de la femme non mariée ayant consenti à l’accueil de ses embryons en application de l’article L. 2141-5 ».

11. En premier lieu, en précisant que la notion de tiers donneur recouvrait tant les donneurs de gamètes que le couple, le membre survivant ou la femme non mariée ayant consenti à l’accueil de ses embryons, le décret du 25 août 2022 n’a fait que tirer les conséquences des dispositions législatives citées au point 5, qui n’excluent pas que la qualité de tiers donneur soit reconnue au donneur de gamètes dans l’hypothèse dans laquelle ce don a permis de concevoir des embryons surnuméraires eux-mêmes susceptibles de faire l’objet d’un don. Le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d’incompétence ne peut, par suite, qu’être écarté.

12. En deuxième lieu, les dispositions contestées de l’article R. 2143-1 n’ont ni pour objet, ni pour effet de faire obstacle à l’application de la règle fixée par l’article L. 1244-4 du code de la santé publique, cité au point 9, selon laquelle le recours aux gamètes d’un même donneur ne peut délibérément conduire à la naissance de plus de dix enfants. Le moyen tiré de sa méconnaissance doit donc être écarté.

13. En troisième lieu, M. D… soutient que les dispositions de l’article R. 2143-1, en ce qu’elles reconnaissent la qualité de tiers donneur au donneur de gamètes dans l’hypothèse dans laquelle ce don a permis de concevoir des embryons surnuméraires eux-mêmes susceptibles de faire l’objet d’un don, rendues applicables dès le 1er septembre 2022, auraient de ce fait méconnu le principe de sécurité juridique, dans la mesure où les couples disposant d’embryons surnuméraires conçus grâce à un don de gamètes n’ont eu que quelques jours pour effectuer le don de tels embryons à des tiers, un tel don ne pouvant plus être effectué à compter du 1er septembre 2022 sans l’accord du donneur de gamètes.

14. Toutefois, ainsi qu’il a été dit au point 4, en vertu des dispositions du C du VII de l’article 5 de la loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique et du décret du 16 août 2023 pris pour son application, la règle selon laquelle « ne peuvent être utilisés pour une tentative d’assistance médicale à la procréation que les gamètes et les embryons proposés à l’accueil pour lesquels les donneurs ont consenti à la transmission de leurs données non identifiantes et à la communication de leur identité en cas de demande des personnes nées de leur don » ne s’applique qu’à compter du 31 mars 2025. Le moyen ne peut donc, en tout état de cause, qu’être écarté. »

Le paragraphe 13 du Conseil d’État indique que le requérant conteste que le décret du 25 août 2022 rende impossible à partir du 1er septembre 2022 de faire don d’embryons surnuméraires conçus grâce à un don de gamètes si le donneur de gamètes n’a pas consenti à la communication de son identité. Le paragraphe 14 du Conseil d’État indique que le décret du 25 août 2022 ne pose pas de problème car les dons d’embryons surnuméraires provenant de donneurs ancien régime (c’est-à-dire ayant fait leur don d’embryons surnuméraires avant le 1er septembre 2022) peuvent être utilisés jusqu’au 31 mars 2025.

7. Une troisième option offerte aux couples et femmes célibataires ?

Pour ce chapitre, nous évoquerons la situation de couples et de femmes célibataires qui font un parcours AMP avec un tiers donneur de spermatozoïdes entre le 2 août 2021 et le 31 mars 2025 et qu’en cas de FIV, il y ait création de plusieurs embryons. Comme expliqué plus haut, il se peut que le donneur de spermatozoïdes ayant permis la création de ces embryons n’ait pas consenti à la communication de son identité.

Une fois le parcours AMP avec tiers donneur terminé, il peut rester des embryons surnuméraires et j’ai indiqué que les bénéficiaires de l’AMP disposaient théoriquement de 2 choix (les donner et les détruire) mais que si le donneur de spermatozoïdes n’avait pas consenti à communication de son identité, il n’était alors pas possible de faire don des embryons. Cependant, pour les couples et les femmes célibataires qui s’opposeraient à la destruction de leurs embryons surnuméraires, on peut se demander s’ils ne disposeraient pas d’une troisième option qui serait de reprendre leur parcours AMP afin de tenter d’avoir des enfants avec leurs embryons restants ? Cette troisième option est parfaitement possible si c’est avant le 31 mars 2025 en revanche, il n’est pas totalement certain que ce soit encore possible après le 31 mars 2025.

Si vous avez connaissance d’un juriste qui se serait penché sur cette question et qui aurait donné une réponse, n’hésitez pas à nous l’indiquer.

[Registre des dons] Est-ce qu’un donneur peut être enregistré dans un traitement de données personnelles sans son consentement ?

1. Le RGPD

Le RGPD protège les données personnelles des citoyens européens. Cela a pour conséquence qu’une administration n’a normalement pas le droit de conserver et de traiter les données personnelles d’une personne sans consentement.

Le RGPD prévoit cependant quelques exceptions. Dans le cas qui nous intéresse, la CAPADD et l’Agence de la biomédecine ont une mission d’intérêt public, ce qui va les autoriser à conserver et traiter des données personnelles sans avoir besoin du consentement de l’intéressé.

2. La CAPADD

Si la CAPADD est saisie par une personne issue d’un don qui exerce son droit d’accès aux origines, la CAPADD peut alors contacter le centre de don pour obtenir l’identité du donneur. Sans avoir besoin de l’autorisation du donneur, la CAPADD peut conserver et traiter les données personnelles du donneur pendant une durée de 100 ans.

3. Le registre des dons de gamètes tenu par l’Agence de la biomédecine

Si un donneur consent à la communication de son identité et de ses données personnelles non directement identifiantes, le centre de don doit inscrire le donneur dans le registre des dons de gamètes et ces informations figureront dans ce registre pendant 120 ans. Le fait que les données personnelles soient conservées et traitées par l’Agence de la biomédecine ne pose pas de problème puisque le donner y a expressément consenti.

Le centre de don ne se contente pas d’inscrire le donneur dans le registre, puisqu’il va également inscrire l’identité de toutes les personnes issues du donneur. Cela signifie que des personnes issues d’un don peuvent figurer dans ce registre sans le savoir et sans y avoir consenti.

Pour l’instant, l’Agence de la biomédecine fait le choix de ne faire figurer dans le registre des dons de gamètes que les donneurs qui ont rempli le formulaire avec leur identité et leurs données personnelles non directement identifiantes. Compte tenu que seuls les donneurs qui ont consenti à la communication de leur identité aux personnes issues de leur don ont le droit de remplir le formulaire, cela signifie que seuls les donneurs ayant consenti à figurer dans le registre des dons peuvent y figurer.

[Registre des dons] Est-ce que l’anonymat est préservé en cas de décès du donneur ?

1. Le cadre dans lequel se pose la question
Nous allons traiter le cas d’une personne issue d’un don qui exerce son droit d’accès aux origines auprès de la CAPADD. Le dossier du donneur existe toujours et celui-ci contient l’identité complète du donneur. Le registre des donneurs de gamètes tenu par l’Agence de la biomédecine est interrogé mais il ne contient aucune information sur le donneur, ce qui signifie que le donneur n’a pas consenti à la communication de ses données personnelles aux personnes issues de son don. La CAPADD interroge l’INSEE et découvre que le donneur est décédé. Dans cette situation, que peut communiquer la CAPADD au demandeur ?

2. Annonce du décès ?
La CAPADD a décidé d’informer les demandeurs quand le donneur est décédé.

3. Communication de l’identité du donneur décédé ?
De nombreuses personnes issues d’un don font un parallèle entre leur situation et celle des nés sous X. Il faut savoir que dans le cas des nés sous X, si la mère biologique ne s’est jamais opposée de son vivant à la communication de son identité à son enfant biologique, alors, celui-ci a le droit de connaître son identité après son décès. Pour les personnes qui font le parallèle entre les nés d’un don et les nés sous X, il serait logique et normal que si le donneur ne s’est jamais opposé de son vivant à la communication de son identité à une personne issue de son don, alors celle-ci doit avoir le droit de connaître son identité après son décès.

Le législateur n’est pas du même avis et considère que les nés sous X et les nés d’un don ne sont pas équivalents. C’est la raison pour laquelle, ce ne sont pas les mêmes articles de loi qui instaurent l’anonymat dans le cas des personnes nées sous X et des personnes issues d’un don. Dans le cas des dons de gamètes, les articles instaurant le principe d’anonymat sont les suivants :
Article 16-8 du code civil : « Aucune information permettant d’identifier à la fois celui qui a fait don d’un élément ou d’un produit de son corps et celui qui l’a reçu ne peut être divulguée. Le donneur ne peut connaître l’identité du receveur ni le receveur celle du donneur. »
Article L1211-5 du code de la santé publique : « Le donneur ne peut connaître l’identité du receveur, ni le receveur celle du donneur. Aucune information permettant d’identifier à la fois celui qui a fait don d’un élément ou d’un produit de son corps et celui qui l’a reçu ne peut être divulguée. »

Le principe d’anonymat du don de gamètes va donc obéir au même principe d’anonymat que le don d’organes. Si quelqu’un bénéficie d’un don de coeur, il y a une forte probabilité que le donneur soit décédé et pourtant, l’anonymat du donneur sera protégé. Cela signifie que le principe d’anonymat perdure malgré le décès du donneur.

4. Communication des données personnelles non directement identifiantes du donneur décédé ?
Le registre des dons de gamètes tenu par l’Agence de la biomédecine contient l’identité des donneurs, ainsi que des données personnelles non directement identifiantes. Certaines personnes issues d’un don considèrent qu’à défaut de pouvoir leur communiquer l’identité du donneur, il devrait au moins être possible de leur transmettre les données personnelles non directement identifiantes.

Pour que le registre des dons de gamètes tenu par l’Agence de la biomédecine possède les données personnelles non directement identifiantes du donneur, il faut nécessairement que le donneur ait rempli un formulaire pour inscrire ses données. Ce formulaire ne peut être rempli que si le donneur a au préalable consenti à la communication de son identité et de ses données personnelles non directement identifiantes aux personnes issues de son don. Cela signifie que si le donneur est décédé sans avoir consenti à la communication d’informations aux personnes issues de son don, le registre des dons de gamètes tenu par l’Agence de la biomédecine ne contient aucune donnée non directement identifiante du donneur ! On comprend alors tout de suite qu’il est impossible de communiquer au demandeur les données personnelles non directement identifiantes du donneur présentes dans le registre des dons de gamètes, pour la simple raison que le registre ne contient pas les données personnelles non directement identifiantes du donneur !

5. Communication des données médicales du donneur décédé ?

On entend parfois que la vie privée d’une personne s’éteint avec son décès mais le loi française prévoit que d’une certaine façon, la volonté d’une personne puisse lui survivre. Un patient peut par exemple décider que son dossier médical doit rester strictement confidentiel et dans ce cas, sa volonté sera respecté.

Si de son vivant, le patient n’a pas exprimé la volonté que son dossier médical reste confidentiel, alors celui-ci peut être consulté par ses ayants droit (conjoint et enfants). Par enfant, il faut comprendre au sens légal de la filiation. Cela signifie qu’un enfant adopté sans lien biologique avec son père aura le droit de consulter son dossier médical après sa mort, alors qu’une personne issue de son don qui n’a pas de lien de filiation avec la donneur, ne pourra pas consulter le dossier médical.

Le législateur a tout de même prévu que si certaines conditions sont réunies (le dossier médical a 50 ans et le patient est décédé depuis 25 ans), alors le dossier médical du patient devient une archive publique qui peut être librement consultée par n’importe qui. Cela signifie que la personne issue du don devrait pouvoir consulter le dossier médical du donneur, sachant qu’elle trouvera dedans ses données médicales, ainsi que son identité.

Pour éviter tout malentendu, je précise que dans cet article, je traite de la possibilité de communiquer les données médicales du donneur directement à une personne issue de son don. Il faut en effet savoir que la loi prévoit la possibilité pour qu’un médecin en charge de la santé d’une personne issue d’un don, puisse obtenir certaines données médicales relatives au donneur. Cette possibilité offerte au médecin d’une personne issue d’un don n’est pas liée au fait que le donneur soit vivant ou décédé.

Le Portrait : Astrid Mahon, comment j’ai retrouvé 16 demi-frères et sœurs

Titre : Le Portrait : Astrid Mahon, comment j’ai retrouvé 16 demi-frères et sœurs
Date : 12 mai 2024
Auteur : TF1, émission Sept à Huit,
Lien : https://www.tf1info.fr/education/video-le-portrait-astride-mahon-comment-j-ai-retrouve-16-demi-freres-et-soeurs-2299145.html

PORTRAIT – Astrid Mahon a d’abord découvert à douze ans qu’elle a été conçue par PMA avec le sperme d’un donneur. Puis, elle découvre qu’elle n’est pas fille unique. Aujourd’hui, ils sont seize demi-frères et demi-sœurs.

Court extrait :

Agnès a fait don de son embryon dans le cadre d’un accord de coparentalité. Maintenant qu’elle voit l’enfant élevé, elle le regrette

Titre : Agnès a fait don de son embryon dans le cadre d’un accord de coparentalité. Maintenant qu’elle voit l’enfant élevé, elle le regrette
Date : 9 mai 2024
Auteur : Edwina Storie
Lien de l’article : https://www.sbs.com.au/news/the-feed/article/agnes-donated-an-embryo-and-is-now-watching-her-child-grow-up-from-afar-she-regrets-it/pkdjfoswy

L’article porte sur les donneurs de gamètes et d’embryons qui peuvent avoir des regrets.
Il faut noter que la réglementation en France est différente de celle en Australie. En France, le don dirigé (donner ses embryons ou gamètes à une personne connue) est interdit car contraire au principe d’anonymat. De plus, les donneurs français ne sont pas informés si leur don a permis des naissances.

PDF de l’article traduit en français

Un gynécologue soupçonné d’insémination avec son sperme devra se plier à un test ADN: “Est-il mon père biologique? J’ai le droit de savoir”

Titre : Un gynécologue soupçonné d’insémination avec son sperme devra se plier à un test ADN: “Est-il mon père biologique? J’ai le droit de savoir”
Date : 10 mai 2024
Lien : https://www.7sur7.be/faits-divers/un-gynecologue-soupconne-d-insemination-avec-son-sperme-devra-se-plier-a-un-test-adn-est-il-mon-pere-biologique-j-ai-le-droit-de-savoir~acf46859/

Extrait : Le tribunal a estimé que dans ce cas particulier, le droit du plaignant d’obtenir la certitude de sa filiation biologique l’emporte sur le droit du gynécologue de dissimuler sa paternité biologique et sur son attente légitime de rester anonyme. Dans ce cas particulier, le tribunal a tenu compte, entre autres, du fait que l’anonymat repose sur la réciprocité – un donneur de sperme ne sait pas quelle femme sera inséminée avec son sperme, tandis que les parents ne savent pas de qui viendra le don.

Des « relations mystérieuses » : qualifier les contacts entre les donneurs et donneuses de gamètes et les personnes issues de leur don

Titre : Des « relations mystérieuses » : qualifier les contacts entre les donneurs et donneuses de gamètes et les personnes issues de leur don
Date : Mai 2024
Auteurs : Anaïs Martin et Isabel Côté
Lien : https://hal.science/hal-04572484v1

Citation : Anaïs Martin, Isabel Côté. Des « relations mystérieuses » : qualifier les contacts entre les donneurs et donneuses de gamètes et les personnes issues de leur don. 91e Congrès de l’Acfas, Acfas, May 2024, Ottawa (Ontario), Canada. ⟨hal-04572484⟩

Résumé : Larry a donné anonymement son sperme dans les années 1970 aux États-Unis. Quarante ans plus tard, une lettre lui apprend qu’une personne issue de son don cherche à le contacter. Se noue alors un lien qui reste difficile à définir aujourd’hui : « Le seul mot qui me vient, c’est ‘mystérieux’. Ce n’est pas définissable dans la langue que je connais. » A travers le monde, d’autres donneurs et donneuses de gamètes font des expériences semblables : depuis le début des années 2000, un certain nombre de personnes conçues par don ont entrepris d’identifier leur géniteur ou génitrice. Si les études empiriques donnent un aperçu du vécu des personnes conçues par don, on en sait encore peu sur la manière dont les donneurs et donneuses vivent ces contacts. Comment considèrent-iels les relations qui peuvent en découler ? Cette intervention présente les résultats d’une étude exploratoire qualitative menée auprès de 15 hommes et 12 femmes ayant donné des gamètes aux États-Unis, en Australie et au Canada entre les années 1970 et 2010, et ayant été contactés par une personne issue de leur don. Elle décrit les diverses réactions que ces prises de contact ont suscité de la part de leurs destinataires, entre surprise, curiosité ou encore prudence, illustrant autant d’enjeux liés à l’organisation du don de gamètes. La nature des relations entre donneurs ou donneuses et personnes issues de leur don sera ensuite interrogée à partir des normes et qualificatifs que les participant·es y associent.

Lien du programme complet : https://www.acfas.ca/evenements/congres/programme/91/400/442/c
(voir le PDF)

Donner ses gamètes : un choix engagé et engageant

Titre : Donner ses gamètes : un choix engagé et engageant
Date : 24 avril 2024
Lien : https://www.mediapart.fr/studio/portfolios/donner-ses-gametes-un-choix-engage-et-engageant