« Ça ne demande pas grand-chose par rapport au bonheur qu’on procure » : cinq personnes expliquent pourquoi elles ont donné leurs gamètes

Titre : « Ça ne demande pas grand-chose par rapport au bonheur qu’on procure » : cinq personnes expliquent pourquoi elles ont donné leurs gamètes
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Date : 15 octobre 2023
Auteur : Mathilde Goupil

[Droit d’accès aux origines] Saisie du CNAOP/CAPADD par un mineur

1. Les définitions

1.a Le mineur émancipé

Sauf exception prévue par la loi, le mineur émancipé dispose d’une capacité juridique similaire à celle d’un majeur.
Article 413-6 du code civil : « Le mineur émancipé est capable, comme un majeur, de tous les actes de la vie civile. »

1.b Le mineur avec discernement

Un mineur avec discernement est un mineur qui, même sans être émancipé, est considéré comme capable de comprendre les conséquences de ses actes.

1.c Résumé

Le mineur émancipé a une capacité juridique élargie par une décision formelle alors que le mineur avec discernement peut agir ou s’exprimer en fonction de sa maturité, mais reste sous l’autorité parentale.

2. Fonctionnement du CNAOP

Peut saisir le CNAOP ?
Majeur
Oui
Mineur émancipé
Oui
Mineur avec discernement (avec l’accord parental)
Oui

Article L147-2 du code de l’action sociale et des familles : « Le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles reçoit la demande d’accès à la connaissance des origines de l’enfant formulée s’il est mineur, et qu’il a atteint l’âge de discernement, par celui-ci avec l’accord de ses représentants légaux ; »

3. Fonctionnement de la CAPADD

Peut saisir la CAPADD ?
Majeur
Oui
Mineur émancipé
Oui
Mineur avec discernement
Non

Article L2143-2 du code de la santé publique : « Toute personne conçue par assistance médicale à la procréation avec tiers donneur peut, si elle le souhaite, accéder à sa majorité à l’identité et aux données non identifiantes du tiers donneur définies à l’article L. 2143-3. »

La difficulté avec cet article de loi concerne le terme « à sa majorité » qui pourrait soit correspondre à une capacité juridique, soit à une limite d’âge explicite (18 ans). Les déclarations du gouvernement durant l’examen de leur projet de loi bioéthique permettent d’éclairer ce point. Les déclarations du gouvernement permettent également de comprendre que c’était une volonté de leur part que pour l’instauration du droit d’accès aux origines soit réservé aux personnes majeures, ce qui rend accessible ce droit aux mineurs émancipés mais pas aux autres mineurs (même ceux avec discernement et accord parental). Cependant, le gouvernement était ouvert à ce que ce point soit rediscuté lors des prochaines révisions de la loi de bioéthique, ce qui pourrait permettre aux mineurs issus d’un don d’obtenir des informations sur le donneur.

3.a) Amendement 420 du 12 septembre 2019 (Télécharger l’amendement PDF)

« Mme la présidente : Elle est ensuite saisie de l’amendement n° 420 de Mme Anne-France Brunet.

Mme Anne-France Brunet : Cet amendement propose, qu’avec l’accord écrit du ou des titulaires de l’autorité parentale, un enfant mineur puisse accéder aux données non identifiantes. Je rappelle qu’un mineur né sous X ayant atteint l’âge du discernement peut, avec l’accord de ses représentants légaux, avoir accès à ces données. Pourquoi introduire une rupture d’égalité d’accès aux origines entre ces deux types de population ? 

Mme Coralie Dubost, rapporteure : Descendre potentiellement très loin dans la minorité pour autoriser l’accès à des données non identifiantes ou identifiantes me semble excessif dans la mesure où, en droit, l’âge de discernement se mesure à la capacité à s’exprimer sur un sujet, ce qui ne signifie pas nécessairement celle de le traiter et le digérer en totalité. C’est déjà lourd pour ces enfants, dans certaines situations. Laissons-les arriver à maturité. Autant je comprends le débat autour de l’âge de 16 ans, autant je considère que là nous allons trop loin.
Avis défavorable.

M. Bruno Fuchs : Cet amendement me paraît extrêmement pertinent. Il propose à un jeune, quel que soit son âge, d’avoir accès à ces données avec ses parents. Si dans le cadre familial, on a procédé relativement tôt à une information sur la façon dont l’enfant a été conçu, pourquoi attendre cinq, sept, ou dix ans ? Ce délai sera alors source d’interrogations et de perturbations.
Comme l’a souligné M. Dharréville précédemment, c’est l’accès aux origines de l’enfant qui est en cause, pas de l’adulte de 18 ans. Si l’on en revient à l’essence même de ce projet de loi, il faut adopter cet amendement.

M. Jean-Louis Touraine : Cette demande fait sens, car il sera difficile d’occuper la période séparant la révélation initiale faite à l’âge de trois ou quatre ans de l’âge de 18 ans sans que l’enfant pose des questions auxquelles personne ne pourra répondre, ce qui sera à l’origine de certaines frustrations.
La mesure proposée serait donc bénéfique. Mais il convient de préciser que cette information passe par les parents, qui pourraient sélectionner les données non identifiantes communiquées à l’enfant en fonction de son âge et de ce qui paraît opportun.

M. Pierre Dharréville : La formule proposée par cet amendement me semble préférable au texte initial. Mais si nous allions dans cette direction, il faut prévoir un accompagnement important et se donner les moyens de faire en sorte que les choses se passent le mieux possible.

Mme Aurore Bergé : Cet amendement ferait courir un risque à l’enfant. C’est l’âge de la majorité qui a été retenu pour autoriser l’accès à l’ensemble des données, identifiantes ou non identifiantes. Et cela ne doit rien au hasard.
En outre, l’anonymat n’est levé qu’au bénéfice de l’enfant. Si cette démarche était accompagnée par les parents, dans quelle mesure pourrons-nous garantir qu’ils n’auront pas accès aux données non identifiantes. Or ce n’est absolument pas notre volonté.
Enfin, si l’on ouvre l’accès à n’importe quel âge, comment être sûr qu’il s’agit du consentement et du souhait de l’enfant âgé de 10, 11 ou 12 ans, et non celui des parents, qui auront peut-être incité à cette démarche. 
Dans l’intérêt de l’enfant, il faut donc conserver l’âge de 18 ans, afin que lui seul puisse faire la demande.

Mme Michèle de Vaucouleurs : J’abonde dans le sens d’Aurore Bergé. L’adolescence est une période de construction qui n’est jamais facile. Il faut laisser ce temps afin de trouver le bon niveau de dialogue avec l’enfant. En effet, s’ils sont quelque peu démunis dans la façon d’aborder la question avec l’enfant, les parents pourraient être tentés de s’en débarrasser en autorisant l’enfant à accéder aux données.

(La commission rejette l’amendement n° 420.) »

3.b) Amendement 1859 du 1er octobre 2019 (Télécharger l’amendement PDF)

« M. le président : La parole est à Mme Florence Provendier, pour soutenir l’amendement no 1859.

Mme Florence Provendier : Je souhaite défendre cet amendement en l’expliquant, car il est frappé au coin du bon sens. Il vise à permettre aux mineurs de seize ans révolus conçus par assistance médicale à la procréation avec tiers donneur d’accéder aux informations non identifiantes de celui-ci.
Dès l’âge de seize ans, le mineur est en capacité de faire des choix seul, notamment s’agissant de sa santé : choix du moyen de contraception, possibilité de recourir à une interruption volontaire ou médicale de grossesse, autonomie pour prendre des rendez-vous avec des praticiens, etc.
Pour choisir en toute connaissance de cause, il apparaît inéquitable que le mineur de seize ans ou plus ne puisse pas avoir accès aux mêmes informations que le médecin qu’il consulte. Aussi l’objet de cet amendement consiste-t-il à faire en sorte qu’il puisse avoir accès aux données non identifiantes du tiers donneur.

M. le président : Quel est l’avis de la commission ?

Mme Coralie Dubost, rapporteure : Vous me pardonnerez, madame Provendier : avant de vous répondre, je voudrais rappeler à chacun, eu égard aux propos tenus précédemment, que des enfants aujourd’hui majeurs issus d’IAD nous regardent –⁠ c’est une certitude. Lorsque vous abordez des sujets les concernant, ils vous écoutent. Veillons donc collectivement, lorsque nous évoquons le donneur et la responsabilité envers ce dernier, à ne pas nous montrer dégradants vis-à-vis des enfants issus de ces dons. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
S’agissant ensuite de votre amendement –⁠ qui concerne ces enfants –, nous nous sommes effectivement posé la question, en audition et en commission. J’avoue avoir été dans l’expectative, notamment s’agissant des informations médicales, pour lesquelles l’âge d’accès semble pouvoir se discuter. Cependant, les données non identifiantes ne se limitant pas aux données médicales –⁠ nous en avons longuement parlé avec les autres rapporteurs au début de l’examen de l’article 3 – mais englobant également la motivation du don, certaines caractéristiques physiques, etc., un accès dès seize ans semble moins adapté.
Pour ce qui est des informations médicales, la commission a modifié le code de la santé publique dans le but de permettre à tout médecin de solliciter la commission d’accès aux données si cela paraît nécessaire. Les avancées obtenues en commission semblent donc de nature à satisfaire l’objectif poursuivi par votre amendement.
J’émets donc, très aimablement, une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

M. le président : Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre : Nous avons tous réfléchi à cette possibilité. Il nous semble que l’âge de dix-huit ans offre la maturité nécessaire. Un jeune de seize ans émancipé par un juge pourra en outre obtenir ces informations de la même façon.
Considérer que, dès l’âge de seize ans, l’on puisse saisir la commission d’accès aux données créerait des complexités importantes. Cette commission inclura des magistrats et des psychologues, et l’enfant devra être accompagné de ses parents. Une telle disposition reviendrait, tout d’un coup, à franchir un cap qui nous semble de nature à complexifier l’accès aux origines plus qu’à le simplifier.
Rien n’empêchera les parents de révéler beaucoup plus tôt à leur enfant sa naissance issue d’un don, et ainsi de lui permettre d’envisager de demander l’accès à ces informations à l’âge de dix-huit ans. Mais le fait d’ouvrir ce droit plus tôt obligerait l’enfant à être accompagné de ses parents pendant toute la démarche, et celui-ci risquerait de subir des pressions –⁠ dans le cas où les parents eux-mêmes, et non l’enfant, demanderaient ces informations. Laissons aux enfants la possibilité de faire ce choix lorsqu’ils disposeront d’une réelle autonomie, c’est-à-dire à dix-huit ans –⁠ l’âge légal –, plutôt que de les mettre dans cette situation à un moment où la place de leurs parents ne sera peut-être pas la même que plus tard, quand ils souhaiteront faire cette démarche seuls.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

M. le président : La parole est à Mme Florence Provendier.

Mme Florence Provendier : Je vous remercie pour ces explications et ne demande qu’à les croire. Toutefois, dès lors qu’un enfant de seize ans dispose de certaines capacités, notamment quant à des actes médicaux –⁠ j’ai bien compris le principe du dossier médical partagé, même si je n’en maîtrise pas toutes les finesses, étant parfaitement béotienne sur ces sujets –, dès lors qu’il peut, à cet âge, posséder sa propre carte vitale et accéder à certains éléments, il y a quelque chose de troublant à affirmer que le médecin pourrait avoir accès à des informations dont le mineur issu d’un don serait exclu. C’est la raison pour laquelle je ne peux pas retirer cet amendement. J’espère que, comme cela se pratique aujourd’hui dans d’autres pays –⁠ en Allemagne, en Norvège ou ailleurs –, les enfants issus de PMA par tiers donneur pourront rapidement accéder à ce type d’information dès l’âge de seize ans.

(Les amendements nos 1646, 1722 et 1859, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) »

3.c) Amendement 714 du 30 juillet 2020 (Télécharger l’amendement PDF)

« M. le président : La parole est à Mme Anne-France Brunet, pour soutenir l’amendement no 714.

Mme Anne-France Brunet : Dans la continuité du précédent échange, cet amendement vise à inscrire dans la loi un principe d’égalité entre les enfants pour l’accès aux données relatives au tiers donneur. En l’état du droit, un enfant issu d’un accouchement sous X peut, dès l’âge de 16 ans, demander à consulter les informations concernant ses origines, alors que le projet de loi prévoit l’accès aux données non identifiantes à partir de 18 ans seulement. Je demande donc que l’on rétablisse l’égalité entre les enfants.

(L’amendement no 714, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) »

3.d) Amendement 1582 du 8 juin 2021 (Télécharger l’amendement PDF)

« M. le président : La parole est à Mme Florence Provendier, pour soutenir l’amendement no 1582.

Mme Florence Provendier : J’en ai parlé tout à l’heure. Si un mineur peut s’émanciper à 16 ans et donner son sang à 17, pourquoi ne pas lui permettre d’accéder aux données non identifiantes du tiers donneur dès l’âge de 16 ans ? J’ai déjà abordé ce sujet à plusieurs reprises : un mineur de 16 ans est capable de faire des choix seul, notamment concernant sa santé. Le médecin a accès aux données non identifiantes ; quand le mineur se rend seul chez lui, pourquoi ne pourrait-il pas avoir connaissance de ces informations ?
Nos voisins européens, que j’ai cités tout à l’heure, ont accordé ce droit aux mineurs, parfois à 16 ans, parfois même à 14. Il me semble que c’est le bon moment pour que nous en fassions autant, étant entendu que nous n’aurons plus l’occasion d’y revenir avant cinq ans ; on peut considérer qu’un jeune de 16 ans en construction dispose de la maturité requise pour accéder à ces informations.

M. le président : Quel est l’avis de la commission ?

Mme Coralie Dubost, rapporteure : Madame Provendier, nous avons déjà longuement débattu de l’âge à partir duquel l’enfant pourra avoir accès aux données non identifiantes et identifiantes. Vous le voyez, c’est la première fois dans l’histoire de l’AMP qu’un gouvernement défend l’avancée consistant à donner aux enfants issus d’une IAD un accès à leurs origines personnelles ; cela provoque encore quelques secousses culturelles –⁠ nous venons d’en discuter, certains devant encore s’habituer à une telle notion.
Par conséquent, nous pensons que dans un premier temps, 18 ans est l’âge adéquat ; c’est l’âge qui est globalement reconnu comme celui de la maturité et de la responsabilité, celui auquel on est capable d’absorber l’ensemble des informations qui nous arrivent. Cela étant, nous verrons avec le temps, plus tard, dans d’autres lois de bioéthique, si cette limite d’âge peut évoluer. Mais à ce jour, pour une première fois, c’est celle qui nous semble la plus raisonnable.

M. le président : Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d’État : Même avis que la rapporteure, dans la lignée des arguments déjà développés. Par ailleurs, si l’on considère l’âge de 18 ans comme celui de la maturité, celui auquel on peut commencer à appréhender ce type de questions, le mineur émancipé pourra avoir accès dès 16 ans à toutes ces informations.
J’ajoute qu’il s’agit d’un droit nouveau et qu’il faut peut-être l’introduire par étapes. Cela n’empêche pas que l’enfant ait accès au récit de ses origines par ses parents. Il en était déjà question à l’article 1er et nous allons encore en discuter lors de l’examen des amendements suivants. Alors que ce sujet a été largement dépassionné, devenant probablement moins tabou qu’il ne l’était pendant des décennies, tout va être fait –⁠ tout doit être fait – pour que la culture du secret qui a prévalu –⁠ sans porter aucun jugement sur les parents qui ont été confrontés à des situations individuelles pas toujours simples – puisse laisser place à la construction de l’identité de l’enfant, en lui donnant accès le plus tôt possible, quand il est prêt et quand ses parents le sont, au récit de ses origines.

M. le président : La parole est à Mme Géraldine Bannier.

Mme Géraldine Bannier : Je suis favorable à l’amendement visant à permettre d’accéder à 16 ans aux données non identifiantes. Je vais prendre un exemple concret : si le jeune se rend compte, en cours de SVT –⁠ sciences et vie de la Terre –, qu’il existe un problème de compatibilité des groupes sanguins, il risque d’apprendre la vérité sur ses origines. Si on ne lui a jamais rien dit, cela peut être assez violent.

M. le président : La parole est à Mme Florence Provendier.

Mme Florence Provendier : Si j’ai bien compris, monsieur le secrétaire d’État, un mineur émancipé de 16 ans pourra avoir accès aux informations non identifiantes du donneur, du fait de son émancipation. Tout en saluant une fois de plus cette avancée majeure dont nous pouvons tous nous réjouir, je regrette le fait que les jeunes de 16 ans devront attendre encore longtemps avant d’avoir accès à leurs origines, contrairement à ceux d’autres pays. Même si j’entends parfaitement votre argumentation, je ne vais pas retirer mon amendement qui est le reflet de mes convictions.

(Les amendements nos 1091, 641, 642, 640, 1092, 668, 639 et 1582, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) »

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Thèse : Révision de la loi relative à la bioéthique concernant l’aide médicale à la procréation avec tiers donneur

Sujet de la thèse : Révision de la loi relative à la bioéthique concernant l’aide médicale à la procréation avec tiers donneur : positionnement des professionnels des centres d’AMP et des CECOS quant à l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes non mariées demandant une AMP en tant que femmes seules

Auteure : Clémence Guillin

Discipline : Médecine humaine et pathologie

Date : Présentée et soutenue publiquement le 9 janvier 2023

Membres du jury :
– Monsieur le Professeur MOUTEL Grégoire [Président]
– Madame BRIELLE Nathalie [Membre]
– Madame le Docteur DENOUAL ZIAD Christine [Membre]
– Madame le Docteur BENHAÏM Annie [Membre]

Résumé :
Lors de la révision de la loi relative à la bioéthique de 2021 a été voté l’accès à l’assistance médicale à la procréation (AMP) pour les couples de femmes et les femmes non mariées. Objectifs : connaître le positionnement des professionnels des Centres d’Étude et de Conservation des Œufs et du Sperme humain et des centres d’AMP, analyser les inadéquations législatives, les chiffres des premiers bilans d’activité et les profils des femmes non mariées.

Matériels et méthodes :
1) questionnaire auprès des professionnels.
2) bilan de l’application de la loi par l’Agence de la biomédecine.
3) données sur les femmes non mariées au CHU de Caen.

Résultats :
1) : l’avis concernant l’élargissement de l’accès à l’AMP était positif pour environ 64 % des professionnels. Ils craignent un allongement des délais et émettent des réserves sur la prise en charge financière ainsi que sur le parcours de soins et ce, de façon majorée, chez les femmes non mariées.
2) : les demandes sont très importantes (environ 16000 demandes de premières consultations depuis août 2021), avec des délais d’attente pour tous allant parfois jusqu’à 3 ans. Le nombre de donneurs est en augmentation.
3) : les âges sont répartis sur toute la fenêtre légale, les motivations menant à un projet seule sont diverses et ne se résument pas en un choix « par défaut » pour toutes les patientes.

Conclusion :
les professionnels étaient globalement en accord avec le législateur. Les demandes à un an sont très nombreuses et diverses. La difficulté principale pourrait venir de l’organisation de l’offre de soins plus que du manque de donneurs. Le système doit s’adapter pour pouvoir répondre au mieux aux besoins.

Mots clefs : Loi de bioéthique, assistance médicale à la procréation, couple de femmes, femmes non mariées, tiers donneur, don

Source : https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-04186067

Citation : Clémence Guillin. Révision de la loi relative à la bioéthique concernant l’aide médicale à la procréation avec tiers donneur : positionnement des professionnels des centres d’AMP et des CECOS quant à l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes non mariées demandant une AMP en tant que femmes seules. Médecine humaine et pathologie. 2023. ⟨dumas-04186067⟩

PMA avec don de gamètes : pourquoi les délais d’attente explosent-ils ?

Titre : PMA avec don de gamètes : pourquoi les délais d’attente explosent-ils ?
Date : 5 août 2023
Lien : https://www.sudouest.fr/sante/pma-avec-don-de-gametes-pourquoi-les-delais-d-attente-explosent-ils-16181404.php


Titre : La PMA avec don de gamètes : plus de demandes, des délais rallongés
Date : 7 août 2023
Lien : https://www.komitid.fr/2023/08/07/la-pma-avec-don-de-gametes-plus-de-demandes-des-delais-rallonges/


Titre : Deux ans après la réforme de la PMA, les demandes ont explosé, les délais aussi
Date : 7 août 2023
Lien : https://www.letelegramme.fr/france/deux-ans-apres-la-reforme-de-la-pma-les-demandes-ont-explose-les-delais-aussi-6407051.php

Les droits des personnes issues d’un don supérieures à ceux des donneurs ?

Est-ce qu’il existe une hiérarchie entre les droits des donneurs et des personnes issues d’un don ?

Le CPDH (Comité Protestant Evangélique pour la Dignité Humaine) a publié le 5 juin 2023 un article traitant de la QPC 2023-1052.

« La semaine dernière, nous vous avions parlé de la première personne née d’une PMA avant la loi de bioéthique 2021 et qui avait pu retrouver son donneur grâce à la procédure officielle, très complexe. Aujourd’hui, nous attendons la décision du Conseil Constitutionnel qui pourrait déclarer cette procédure inconstitutionnelle. »

Le CPDH fait référence à « Charles » qui a fait une demande auprès de la CAPADD pour obtenir l’identité de son donneur. La QPC ne porte pas atteinte à ce droit et quelle que soit la décision du Conseil Constitutionnel, les personnes issues d’un don pourront bien évidemment continuer à faire des demandes auprès de la CAPADD.

Dans l’hypothèse où un ancien donneur (c’est-à-dire qui a fait son don avant le 1er septembre 2022) est favorable à la communication de son identité, la procédure est relativement simple. Il suffit dans un premier temps de transmettre son consentement à la CAPADD, puis de remplir un formulaire et de le transmettre à un médecin travaillant dans un centre de don afin qu’il entre les données dans le registre des dons tenu par l’Agence de la biomédecine. La QPC ne porte pas atteinte à ce droit et quelle que soit la décision du Conseil Constitutionnel, les anciens donneurs pourront bien évidemment continuer à consentir à la communication de leur identité.

Quand la CAPADD reçoit une demande, elle consulte le registre des dons géré par l’Agence de la biomédecine et si le donneur figure dedans, il est possible de transmettre ses données aux personnes issues de son don. C’est ce qui s’est passé pour Charles et c’est ce qui continuera à se produire quelle que soit la décision du Conseil Constitutionnel concernant la QPC.

Il est donc faux de prétendre que la QPC pourrait avoir pour conséquence d’empêcher des personnes issues d’un don d’accéder à leurs origines.

« Espérons que les juges entendront la souffrance de tous ceux privés de leurs origines et du droit de savoir. Les droits de l’enfant doivent prévaloir sur ceux des adultes. »

De notre côté, nous estimons que les donneurs n’ont rien fait de mal, qu’ils ont le droit comme tout le monde de bénéficier de la dignité humaine et de ne pas voir leurs droits bafoués.

Est-ce que le CPDH est informé des conditions à remplir pour avoir le droit de saisir la CAPADD ? Ce droit de saisir la CAPADD est réservé aux personnes issues d’un don qui sont majeures, c’est-à-dire des adultes ! A titre informatif, ceux qui saisissent la CAPADD ont en moyenne 34 ans et ne sont en rien des enfants. Il est donc faux d’employer le terme enfants pour désigner les personnes issues d’un don qui exercent leur droit d’accès aux origines. Il n’y a bien évidemment pas de hiérarchie des droits entre 2 adultes.

Il se peut éventuellement que le CPDH emploie le terme de « enfant » non pas pour désigner un mineur, mais dans le cadre d’un lien de filiation/parenté. Avec le sous-entendu que les droits des enfants est supérieur à ceux de leurs parents. Des associations de personnes nées sous X estiment notamment que leur droit d’accès aux origines devrait primer sur le droit de leur mère à accoucher dans le secret. Cependant, est-ce possible d’établir une comparaison entre une mère qui abandonne son enfant avec une femme qui fait un don d’ovocytes ?

Le dictionnaire donne la définition suivante du mot « mère » : « femme qui a mis au monde, élève ou a élevé un ou plusieurs enfants ». Je n’ai pas connaissance qu’il soit indiqué une autre définition du mot mère dans la Bible.

Une femme qui accouche et qui va ensuite abandonner son bébé peut être considérée comme la mère de l’enfant. Une femme qui ne fait que donner des cellules (des ovocytes), ne peut en revanche pas être considérée comme la mère. C’est la raison pour laquelle, dire que les droits de l’enfant sont supérieurs à ceux de sa mère ne peut pas s’appliquer dans le cadre du don de gamètes.

Il nous semble mal venu de vouloir établir une hiérarchie entre les droits d’individus adultes n’ayant aucun lien de filiation/parenté entre eux.

La question du consentement pour les anciens donneurs sous tutelle

La loi relative à la bioéthique promulguée le 2 août 2021 a instauré un droit d’accès aux origines pour les personnes issues d’une AMP avec tiers donneur. Nous pensons qu’il est souhaitable de clarifier les modalités d’application de ce nouveau droit et c’est la raison pour laquelle, nous avions fin 2021/début 2022 posé de nombreuses questions à l’Agence de la biomédecine mais ils n’avaient pas su nous répondre car ils attendaient la publication des décrets et arrêtés afin de mieux comprendre comment serait appliqué le droit d’accès aux origines. Dans ces questions posées pour lesquelles nous n’avions pas pu avoir de réponse, figurait une question sur les donneurs sous tutelle.

Afin de rendre effectif le droit d’accès aux origines, il a été mis en place une Commission (la CAPADD). Le ministère de la Santé a souhaité nommer une association de donneurs dans cette Commission. Dans le cadre de la CAPADD, nous pouvons donc aborder des sujets qui nous semblent pertinents pour les donneurs.

1. Quelle personne peut être concernée par une mesure de tutelle ?

La tutelle s’adresse à une personne majeure ayant besoin d’être représentée de manière continue dans les actes de la vie courante. Et ce, du fait de la dégradation (altération) de ses facultés ou de son incapacité à exprimer sa volonté.

La personne protégée peut cependant réaliser seule certains actes dits strictement personnels.

2. Le consentement au don de gamètes

La loi impose que toute personne désirant devenir donneur, donne 2 consentements :
– Consentement au don de gamètes
– Consentement à la communication de son identité dans le cadre du droit d’accès aux origines

Le consentement est un acte strictement personnel qui doit nécessairement être libre et éclairé.

3. Est-ce qu’une personne sous tutelle peut faire un don de gamètes ?

Non, cela est strictement interdit par la loi.

article L1241-2 du code de la santé publique
Aucun prélèvement de tissus ou de cellules, aucune collecte de produits du corps humain en vue de don ne peut avoir lieu sur une personne vivante mineure ou sur une personne vivante majeure faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation à la personne.

Décision du Conseil Constitutionnel n°2021-821 DC du 29 juillet 2021 (PDF)
3. Les députés requérants soutiennent que ces dispositions autoriseraient toutes les personnes placées sous tutelle ou curatelle à procéder à de tels dons. Il résulte toutefois de l’article L. 1241-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de l’article 11 de la présente loi, que les personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation de la personne ne peuvent y procéder. Dès lors, la critique des requérants, qui n’est assortie d’aucun grief d’inconstitutionnalité particulier, manque, en tout état de cause, en fait.

4. Droit d’accès aux origines

Depuis le 1er septembre 2022, les personnes issues d’un don peuvent saisir la CAPADD pour connaître l’identité de leur donneur. La CAPADD est alors chargée de retrouver le donneur et de le solliciter pour qu’il consente à la communication de son identité.

La Fédération Française des CECOS fête cette année ses 50 ans d’existence, ce qui permet de comprendre que les donneurs des années 70/80 sont âgés, et qu’ils puissent éventuellement être sous tutelle. La question légitime est de savoir si un donneur sous tutelle est apte à signer le document de consentement à la communication de son identité.

5. Est-ce qu’un ancien donneur sous tutelle peut consentir à la communication de son identité ?

Les juristes ayant traités cette question semblent unanimes sur le fait que cela n’est pas possible (nous n’avons en tout cas pas connaissance de juriste ayant dit le contraire).

A titre d’exemple, nous vous proposons l’intervention de Madame Stessy TETARD (Maître de conférences et directrice pédagogique à l’institut des sciences de la famille à l’université catholique de Lyon) datant du 21 avril 2022 (https://donsdegametes-solidaires.fr/event/cyberethique/) et qui traite justement de cette question.

De notre côté, nous avons proposé que la CAPADD puisse solliciter les anciens donneurs même si ceux-ci sont sous tutelle mais qu’il soit systématiquement demandé à un juge de se prononcer sur la validité du consentement. Ce ne serait que dans le cas où un juge validerait le consentement donné par le donneur sous tutelle, que la CAPADD serait en droit de communiquer les informations au demandeur. Cependant, cette solution n’est pas possible car le juge pourrait seulement être sollicité après que le donneur sous tutelle ait donné son consentement.

Dans certaines circonstances, ce n’est pas un problème que le juge se prononce après coup sur la validité du consentement d’une personne sous tutelle car il est possible d’annuler les effets du consentement. Cependant, dans le cadre du consentement à la communication de l’identité du donneur, cela n’aurait aucun sens que le juge se prononce après que l’identité du donneur sous tutelle ait été transmise à la personne issue du don. En effet, nous sommes dans un cas où il n’est pas possible d’annuler les effets du consentement.

Pour information, si les personnes sous tutelle sont interdites de faire un don de gamètes/tissu/organe/sang, c’est que justement, il est impossible d’annuler les effets de son don. Par exemple, si la personne sous tutelle a consenti à un don de spermatozoïdes et que le juge estime après coup qu’il n’avait pas le droit de le faire, il serait bien évidemment inenvisageable de demander à toutes les bénéficiaires de ce don d’avorter.