Faire une AMP avec un don de spermatozoïdes de son frère ?

Une femme française célibataire nous a écrit pour nous poser une question un peu originale. Sa question est de savoir si sur le plan légal ou moral, cela pose problème qu’elle fasse un bébé avec un double don de gamètes, sachant que les spermatozoïdes seraient donnés par son frère ?

Est-ce légal d’avoir un double don à l’étranger ?

Le double don de gamètes n’est pas encore autorisé en France mais il le sera probablement prochainement dans le cadre de l’actuel projet de loi bioéthique. De nombreux autres pays autorisent des femmes à faire un parcours AMP avec un double don de gamètes. Sauf erreur de notre part, une femme française a parfaitement le droit de se rendre à l’étranger pour bénéficier d’un double don de gamètes dans lequel la pratique est autorisée. Nous n’avons en tout cas pas connaissance d’une femme qui aurait été poursuivie en France après avoir bénéficié d’un double don à l’étranger.

Est-ce légal de bénéficier d’un don dirigé à l’étranger ?

Le don dirigé (voir notre article Le don dirigé (ou don relationnel)) est interdit en France car la loi impose que le donneur soit anonyme. Cependant, cette pratique est parfaitement légale dans de nombreux pays. Nous n’avons pas connaissance d’une femme qui aurait été poursuivie en France après avoir bénéficié d’un don dirigé à l’étranger. Si la femme se rend dans un pays qui autorise le don dirigé, cette femme pourra de manière légale choisir que le donneur soit une personne bien précise.

Est-ce légal de bénéficier d’un don d’ovocytes de sa sœur à l’étranger ?

La mère de l’enfant peut souhaiter un lien génétique avec son enfant et c’est la raison pour laquelle des femmes ayant besoin d’un don d’ovocytes font parfois appel à leur sœur. Nous n’avons pas connaissance d’une femme qui aurait été poursuivie en France après avoir bénéficié d’un don d’ovocytes provenant de sa sœur.

Sur Internet, on trouve de nombreux témoignages de femmes ayant bénéficié d’un don venant de leur sœur. Par exemple « Ma sœur m’a donné ses ovocytes » qui explique bien les motivation à faire appel à sa sœur :
Nous étions à peine installés dans son cabinet que le gynéco nous expliquait : « Charlotte, étant donné votre âge et votre pathologie, vous êtes éligible au don d’ovocytes. C’est légal. Mais cela risque de prendre plusieurs années. » Me faire donner des ovocytes par une inconnue ? Impossible. J’avais déjà lu des témoignages de personnes nées d’un don de sperme qui se posaient toutes les mêmes questions : « D’où je viens ? A qui je ressemble ? » Non, vraiment, cette solution ne me paraissait pas du tout envisageable. Je le dis au médecin. Il me répondit, sibyllin : « Vous avez des sœurs ? Elles ont des enfants ? Vous savez, le don d’ovocytes marche très bien entre sœurs… Mais il est interdit en France. Je peux vous donner des adresses en Belgique, si vous voulez… »
Au moment où on parlait, mon téléphone a sonné. Virginie ! A croire qu’elle a des antennes… « Alors, que vous a proposé le médecin ? » Je lui raconte l’entrevue. Un court silence passe et elle me lance : « Eh bien, s’il n’y a que cela, je vais t’en donner, des ovocytes ! » Elle avait dit ça de manière spontanée. Sans réfléchir. Du Virginie pur sucre ! « C’est une décision lourde de conséquences. Réfléchis. – Non, mais c’est tout vu ! On a toujours tout partagé, nous deux. Cette fois-ci, la répartition n’a pas été équitable. Mes ovocytes sont aussi un peu les tiens. Dès que j’aurai accouché, on fera les démarches pour toi… » Et elle raccrocha. Peu à peu, cela m’a fait réaliser qu’il n’y avait pas de meilleure solution pour nous. Ainsi, notre enfant connaîtrait sa part génétique manquante. Il aurait les mêmes grands-parents que s’il avait été conçu avec mes gamètes. Quand il grandirait, je lui expliquerais : « Maman n’avait pas de petite graine pour te fabriquer. C’est Virginie qui te l’a donnée. »

Est-ce légal de bénéficier d’un don de spermatozoïdes de son frère à l’étranger ?

La femme qui nous interroge a besoin d’un double don de gamètes car elle est célibataire et ses ovocytes sont de mauvaise qualité (elle a plus que 40 ans). Elle a une sœur mais celle-ci est encore plus âgée qu’elle et donc, elle ne peut pas être sa donneuse, ce qui fait qu’elle fera appel à une donneuse externe à la famille. Pour ce qui est du donneur de sperme, elle aimerait faire appel à son frère qui est d’accord pour cela. Cette femme s’est renseignée aux Etats-Unis et elle aurait trouvé une clinique qui accepterait de pratiquer la FIV (précisons que la clinique américaine n’aurait probablement pas accepté de réaliser la FIV s’il n’y avait pas eu un don d’ovocytes, ceci afin de limiter les risques de consanguinité pour l’enfant). Son interrogation était de savoir si sur le plan légal ou moral, elle pourrait avoir des problèmes ?

Selon nous, la réponse est non. Elle a pleinement respecté la législation américaine et on peut comprendre qu’elle puisse désirer avoir un lien génétique avec son enfant.

Edit : Il nous a été rapporté que ce cas de figure s’était déjà produit en 2001.
Une mère de 80 ans vivait dans le Var avec sa fille célibataire de 62 ans et son fils handicapé de 52 ans. Les deux enfants sont partis aux Etats-Unis pour bénéficier d’une AMP/GPA. Le fils handicapé de 52 ans a pu avoir un enfant grâce à une gestatrice. La fille de 62 ans a eu bénéficié d’un don d’ovocytes venant de la gestatrice de son frère, et elle a bénéficié d’un don de spermatozoïdes provenant de son frère.

Article du Parisien du 16 juin 2001 : Le frère de la mère de 62 ans a un bébé (Télécharger au format PDF)

Article du Parisien du 20 juin 2001 : Mère à 62 ans : son frère est le père (Télécharger au format PDF)

Extrait :
« Jeanine . Je ne pouvais plus transmettre mon patrimoine génétique à cause de mon âge, alors j’ai voulu transmettre le sien et donner la vie pour que notre lignée continue. Je n’aime pas les adoptions alors, de cette façon, il y a un vrai lien de parenté avec l’enfant. J’ai beaucoup réfléchi avant de faire ça. Dans le passé, j’ai fait des tentatives de fécondation in vitro en France avec mes propres ovules et un don de sperme de mon compagnon d’alors, mais elles avaient échoué. Même à 62 ans, je voulais un enfant et je suis allée au bout de mon rêve en allant aux Etats-Unis. »