Explications sur le risque de sollicitation financière dans le cas où les donneurs ne seraient plus anonymes
Depuis quelques mois, des spécialistes font des articles sur les dangers pour les donneurs de gamètes qui pourraient apparaître avec l’instauration d’un droit d’accès aux origines pour les donneurs.
C’est par exemple le cas de la juriste Laure de Saint-Pern qui estime que des personnes issues d’un don pourraient réclamer des subsides aux donneurs (voir notre article La filiation des enfants à l’égard des femmes seules et des donneurs).
C’est également le cas du docteur Jacques MONTAGUT qui évoque ce risque (article : Le don de gamètes et ses cinq parties prenantes) en ajoutant que la réciproque pourrait également se produire.
(Jacques MONTAGUT est médecin et biologiste de la reproduction, il est directeur de l’Institut francophone de recherche et d’études appliquées à la reproduction de Toulouse. Il est ancien membre du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), de la Commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction, du Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine. Il est aujourd’hui membre de la délégation française du Comité directeur pour la bioéthique au Conseil de l’Europe.)
Comme cet argument revient régulièrement et qu’il concerne directement les donneurs, j’ai pensé qu’il serait intéressant de le traiter.
Le cas des enfants abandonnés/adoptés
Pour éviter tout malentendu, précisons bien que la situation des enfants abandonnés est très différente de celle des enfants issus d’un don.
Je n’ai pas connaissance d’enfants abandonnés qui ont essayer de soutirer de l’argent à leurs géniteurs. Il semblerait donc que les enfants qui sont à la recherche de leurs origines ne fassent pas cette démarche pour des raisons financières.
Certains articles que j’ai lus faisaient état d’enfants abandonnés qui après avoir retrouvé leurs géniteurs, leur ont versé une aide financière (certains géniteurs vivant dans la plus grande misère).
Analyse des situations réelles
Rappelons tout d’abord que l’article 311-19 du code civil indique : « En cas de procréation médicalement assistée avec tiers donneur, aucun lien de filiation ne peut être établi entre l’auteur du don et l’enfant issu de la procréation. Aucune action en responsabilité ne peut être exercée à l’encontre du donneur. ».
Je n’ai pas connaissance de personnes issues d’un don en France déclarant vouloir retrouver le donneur afin de lui soutirer de l’argent. Au contraire, certaines personnes issues d’un don insistent sur le fait qu’elles n’en veulent pas à l’argent du donneur.
L’association PMAnonyme indique avoir retrouvé 37 donneurs et je n’ai pas connaissance que des personnes issues d’un don aient essayé de contraindre un donneur à leur verser de l’argent.
A l’étranger, le nombre de donneurs retrouvés est beaucoup plus conséquent et encore une fois, je n’ai pas connaissance que des personnes issues d’un don aient cherché à contraindre le donneur de leur verser de l’argent.
Pour l’instant, il me semble qu’il n’existe pas de preuve que des personnes issues d’un don chercheront à contraindre le donneur à leur donner quelque chose.
L’aide sans contrainte
Je suis en revanche convaincu qu’on assistera à des situations d’assistance entre le donneur et les personnes issues d’un don, et ceci de manière volontaire (c’est à dire sans contrainte). Ces situations d’entraide pourraient se produire si le donneur et la personne issue d’un don nouent une relation.
Lors de la Journée les enfants de la science 2020, il a été donné plusieurs exemples de motivations de donneurs. Il a par exemple été donné le cas d’un donneur de plus de 40 ans sans enfant et ayant une bonne situation financière, et son objectif était de léguer son patrimoine aux personnes issues de son don. J’ignore s’il y a beaucoup de donneurs comme lui et j’ignore si cela se produira réellement, mais il est vraiment important de bien insister que si le donneur devait faire un don aux personnes issues de son don, cela se ferait sans contrainte.
Publication de Frédéric LETELLIER