Témoignage: Coralie, donneuse d’ovocytes.

Derrière le don de gamètes, il y a de vraies personnes qui ont, un jour, choisi de s’engager dans cette démarche très particulière. Aussi, il est important de donner la paroles aux femmes et aux hommes qui ont fait ce geste. Aujourd’hui, c’est Coralie, jeune femme trentenaire qui nous explique son parcours de donneuse d’ovocytes.

Bonjour Coralie:

Bonjour!

Peux-tu te présenter brièvement (dans la limite des informations identifiantes que tu souhaites ou pas donner, ex: ton âge, des enfants, un compagnon, etc.?)

Donc je m’appelle Coralie, j’ai actuellement 28 ans (j’en avais 27 au moment du don, pour info) je suis sans enfants (pour l’instant) et je vis depuis quelques années avec mon compagnon. Je réside pour l’instant en région francilienne.

•  C’est quoi pour toi un don de gamètes?

Le don de gamètes c’était avant tout une petite idée qui a germé il y a quelques années à la suite d’une émission de télé qui en parlait. Puis qui est devenu un projet, une envie de “donner”. De la même manière que je donne régulièrement mon sang dans le but de (peut-être venir) en aide, ou que je suis inscrite sur le registre de moelle osseuse, ou encore que je suis totalement pour le don d’organes. Voilà, le don de gamètes s’inscrivait pour moi dans cette démarche.


Peux-tu nous expliquer ce qui t’a donné envie de faire un don d’ovocytes?

Comme je le disais plus haut, j’ai regardé il y a quelques années une émission :
« Les Maternelles”* (émission que je suis depuis un sacré bout de temps maintenant) et d’ailleurs en y repensant c’est avec eux que j’ai vraiment découvert ces notions de PMA, FIV etc. Car à ce moment-là, on n’en parlait pas beaucoup encore (dans les médias en tous cas). Bref le temps a passé, et j’ai réellement recommencé à y songer quand par hasard, un jour, j’apprends que la loi a changé et que les nullipares peuvent à présent donner. À l’époque j’étais très prise par beaucoup de choses (études notamment) et finalement mon envie s’est concrétisée il y a deux ans. Finalement, avant de moi-même avoir des enfants (je ne me demandais pas si j’avais potentiellement des soucis ou pas d’ailleurs), j’avais envie de réaliser “ça”. Et pour également reprendre ce que j’aborde dans la question précédente, pour moi le don de gamètes au final ne m’engageait pas plus ou moins qu’un don de sang. Bien entendu en termes de suivi, d’examens à subir c’est difficilement comparable. Tout comme le fait que j’ai tout de même conscience qu’il ne s’agit pas en tous points du même type de don. La principale différence je dirais, vient surtout de l’empathie qui m’a poussé vers le don de gamètes, l’idée que désirant être mère moi-même, je n’imaginais que difficilement ce que pouvait ressentir une femme (un couple) dans l’incapacité d’en avoir.

Comment se sont déroulés les différentes étapes de ton don d’ovocytes?

Le parcours aura duré pratiquement un an pour moi. En premier lieu, la prise de contact avec le Cecos à la fin du printemps, je reçois un premier dossier (1 mois après) avec plein d’informations, des premiers examens à faire pour savoir si j’étais éligible (prise de sang, échographie de réserve ovarienne, certificat médical). À la fin de l’été j’ai renvoyé le dossier avec tous les examens, puis j’ai eu mes premiers rendez-vous au CECOS à l’automne (biologiste, psychologue, généticien). Mes derniers rendez-vous ont eu lieu en hiver en début d’année, et il a fallu encore attendre 2/3 mois avant d’avoir un accord validé et un appel de la sage-femme pour lancer le protocole…au printemps.

Peux-tu nous donner ton avis sur les conditions de ta prise en charge globale?
As-tu été bien accueillie par les équipes en charge du don de gamètes?

Alors en termes d’accueil et de prise en charge médical je n’ai eu aucun souci, j’ai même eu quelques problèmes de synchronisation avec la SECU** et au final c’est le CECOS qui s’est chargé de tout régler. Les équipes étaient très gentilles dans la globalité. Mais j’ai quand même eu le regret de constater qu’au fur et à mesure de l’avancée des choses j’étais de plus en plus « livrée » à moi-même. J’exagère un peu mais en comparaison, lors des premiers entretiens on prenait un temps fou pour tout m’expliquer, faire des schémas, etc., et en comparaison une fois le protocole lancé et donc la dernière ligne droite (et la plus stressante),  les rendez-vous sont expédiés (à leur décharge, c’est un gros CECOS) et on se retrouve toute seule avec ses angoisses. Enfin j’ai eu ce sentiment désagréable une fois le don fini d’être « lâchée ». Alors bien entendu que ce soit clair, le but de ce don n’était pas de me faire construire une statue en place publique ou de recevoir des fleurs à vie ;), mais disons que j’avais vraiment pensé que j’aurais un message, un compte-rendu, voire un examen de contrôle pour voir si l’après don s’était bien passé…

Quels sont les points positifs et les points négatifs que tu aimerais souligner?

Mhhh, et bien pour les points positifs que dire à part que j’en suis ressortie avec un sentiment de joie et l’espoir d’avoir peut-être apporté la petite étincelle qui manque à un couple, quelque part. En ce qui concerne la prise en charge elle-même et bien comme je l’ai dit, tout le monde était tout de même très bienveillant et accueillant, sans a priori sur ma situation de « nullipare ».

Pour les points négatifs je vais me répéter mais je déplore le fait de m’être sentie tout à fait en roue libre sur la fin du parcours et SURTOUT de n’avoir eu aucun examen post-don de quelque sorte. Encore aujourd’hui je ne comprends pas que ça ne soit pas le cas systématiquement, en dehors de complications cliniques je veux dire.

Ah et surtout si je peux donner un conseil pour les futures (1ères) donneuses
=> on vous demande en début de parcours si vous préférez les injections faites par une infirmière ou seule. La sage-femme m’avait montré comment faire avec les premières injections (les « faciles » je dirais, qui ne nécessite pas d’expérience particulière)  mais ATTENTION, personne ne m’avait parlé de la dernière piqûre de DECAPEPTYL*** (ou équivalent) qui est pourtant la plus importante, vraiment demandez une infirmière pour celle-là, ça vous évitera tellement de stress (et de larmes sûrement !)

•  La levée de l’anonymat des donneuses et donneurs de gamètes et des couples
donneurs d’embryons, tu en penses quoi?

C’est une épineuse question, mais de mon côté je suis plutôt pour. Pourquoi ? On ne sait pas d’avance ce qui se passera pour tel ou tel enfant né d’un don de gamètes, comment va-t-il grandir ? Dans l’idée où les parents sont transparents sur la situation, comment peut-on savoir si l’enfant ne rencontrera pas des problèmes de quelque ordre qu’il soit à un moment de sa vie (psychologiques ou physique). Partant de ces suppositions, je pense qu’il est bon d’être le plus transparent possible vis-à-vis de ces enfants. Bien sûr, dans cette optique je ne prends pas vraiment en compte le sentiment des parents, mais je pense toutefois qu’il serait bon que l’anonymat puisse être levé si l’enfant le désire à un moment de sa vie.

•  Comment envisages-tu la perspective d’être un jour peut-être, recontactée par
un enfant devenu adulte et conçu grâce à ton don?

À vrai dire c’est compliqué d’envisager cela. Ce don, j’étais heureuse de le faire, mais je n’y pense plus vraiment dans la vie de tous les jours. Je me contente de me tenir au courant des actualités juridiques car si la loi était amenée à changer j’aimerais BIEN ENTENDU être au courant.

•  As-tu dans ton entourage (familial, amical, professionnel) d’autres personnes
qui ont fait ou qui envisage de faire un don de gamètes ou d’embryons?

Non, ou alors je n’en ai pas connaissance. J’ai eu des connaissances qui sont passées par des FIV et le peu de fois où j’ai évoqué le sujet du don avec des ami-e-s, la plupart saluaient le geste sans pour autant exprimer l’envie de le faire.

En France, les candidates au don d’ovocytes sont très peu nombreuses,
qu’est-ce qui selon toi pourrait contribuer à motiver les femmes à se présenter

dans les Cecos pour faire un don?

Je ne sais pas à vrai dire… Avec un peu de cynisme je dirai que si, à l’instar d’autres pays, le don de gamètes devenait rétribué il y aurait fatalement plus de candidates. Mais si c’était un jour le cas, ce serait un grand malheur de mon point de vue. Alors, dans l’immédiat à part la sensibilisation je ne vois pas comment pousser les femmes à donner.

Inciterais-tu des femmes de ton entourage à faire un don d’ovocytes?
Si oui, pourquoi? Si non, pourquoi?

Et bien je dirais que si une femme dans mon entourage présentait un intérêt, même léger, en faveur du don d’ovocytes, je l’encouragerais grandement dans cette voie et je lui donnerais tous les conseils et les infos dont elle aurait besoin. Je ne sais pas si j’arriverai à inciter « gratuitement » les femmes à donner ; enfin, je veux dire que le don que j’ai fait est quelque chose que j’assume et dont je n’ai pas honte de parler, donc quand j’en ai l’occasion j’essaie d’informer les gens autour de moi.

Une dernière chose à ajouter? Une dernière anecdote à partager avec nous?

Si c’était à refaire, je le referai… Peut-être ;). Ou dans quelques années seulement. Mais je suis ravie d’avoir apporté ma petite pierre, ma contribution à ce grand projet.

Merci à Coralie pour son précieux témoignage qui contribuera, nous l’espérons à l’amélioration des conditions de prise en charge des donneuses d’ovocytes en France et à inciter également d’autres femmes à s’interroger sur le don d’ovocytes et pourquoi pas, s’engager un jour peut-être dans la démarche du don.


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* L’émission s’appelle désormais « La Maison des Maternelles » à voir sur France 5 du lundi au vendredi.

** Lorsque l’on souhaite faire un don d’ovocytes, il faut savoir que l’on est prise en charge à 100% par l’Assurance Maladie. Cependant, comme dans le cas de Coralie, la synchronisation prend parfois un peu de temps. Il est donc important de faire la demande de prise en charge par l’Assurance Maladie rapidement après avoir entamé les démarches du don. Pour cela, renseignez-vous bien auprès de votre Cecos pour connaître la marche à suivre pour éviter tout problème. Car encore une fois, lorsque vous faites un don de gamètes et a fortiori d’ovocytes, vous n’avez rien à payer. Les frais que l’on doit parfois avancer, qu’ils soient médicaux ou non médicaux (billet de train, essence, garde d’enfant, rendez-vous chez un gynécologue libéral, etc.) doivent impérativement vous être remboursés dans la totalité.

Pour plus d’infos sur la prise en charge financière du don d’ovocytes (et autres éléments du corps humain):
> https://www.agence-biomedecine.fr/IMG/pdf/tarification_dons_vivant.pdf
> https://donsdegametes-solidaires.fr/2019/09/01/remboursement-des-frais-medicaux-et-non-medicaux/

*** Le Décapeptyl 0,1mg© est un médicament injectable qui sert à déclencher l’ovulation en vue de la ponction qui sera réalisée environ 36h après ladite injection (Ex: si la ponction ovocytaire est prévu un lundi matin à 8h30, il faudra réaliser l’injection de Décapeptyl 0,1mg© ou tout autre médicament équivalent 36h avant, c’est à dire, si mes calculs sont bons, le samedi soir à 20h30).
Lorsqu’on suis un protocole de stimulation ovarienne en vue d’un don d’ovocytes, cette dernière injection est très importante et comme le souligne Coralie, cela peut parfois générer un stress: en effet,
le Decapeptyl 0,1mg© se présente sous forme d’une poudre à mélanger avec une solution liquide et ce n’est pas toujours simple d’utilisation (pour avoir moi-même utilisé ce médicament lors de mon don d’ovocytes, je confirme que ce n’est pas très simple et donc générateur de stress). Il est important de noter également que le mélange poudre/solution doit se faire juste avant l’injection et à l’heure indiquée par l’infirmière de votre Cecos sinon, l’efficacité du produit s’en verra largement réduite et peut tout simplement conduire la ponction ovocytaire à l’échec.

Pour pus d’infos sur le Décapeptyl 0,1mg©, quelques liens utiles:
> https://eurekasante.vidal.fr/medicaments/vidal-famille/medicament-odecap01-DECAPEPTYL.html
> https://www.wistim.com/fiches/risques_fiv.html
> Tutoriel pour comprendre comment utiliser le Décapepetyl© et comment faire l’injection:
https://www.youtube.com/watch?v=JInkLarn3nk

Témoignage de Christian, donneur de spermatozoïdes

Christian a récemment contacté notre association pour donner son point de vu concernant la levée de l’anonymat des donneurs. Pour en savoir plus sur son parcours et son expérience du don de gamètes, nous lui avons proposé de répondre à nos questions. Nous vous proposons aujourd’hui de lire son témoignage.

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Bonjour Christian:

Tu as fait plusieurs dons de gamètes dans les années 2000 et tu as récemment contacté notre association pour apporter ton témoignage.

  • Peux-tu nous expliquer pourquoi et dans quel contexte tu as choisi de faire plusieurs dons de gamètes?

Mon choix de prendre en charge la contraception de notre couple par le biais d’une vasectomie, s’est fait après avoir longuement discuté de l’irréversibilité de la méthode avec mon épouse. Pendant le processus précédant cette opération, il m’a été proposé par le CECOS de Rennes de faire des dons de spermatozoïdes. Habitué aux dons de sang et partisan depuis longtemps du don d’organes, j’ai tout naturellement accepté.

  • Comment as-tu évoqué le sujet du don de gamètes avec ta compagne?

La aussi, tout naturellement. Nous nous sommes seulement posé la question de savoir comment nous réagirions si l’un de nos enfants vivait en couple avec un(e) conjoint(e) nait dans la pèriode suivant mes dons.

  • As-tu expliqué à tes enfants que tu as fait des dons de gamètes?
    Si oui, comment? Si non, pourquoi?

À l’époque, non. Sans raisons particulières. Mais nous en avons toujours parlé librement avec des amis ou de la famille devant eux.

  • Peux-tu nous donner ton avis sur les conditions de ta prise en charge globale à l’époque?

Je me souviens que le processus m’a paru un peu long à l’époque avec le questionnaire sur mes ascendants et sur les éventuels problèmes de santé de la famille, mais c’est tout.

  • Quels sont les points positifs et les points négatifs que tu aimerais souligner?

Le point positif, comme avec tous dons, c’est la satisfaction de pouvoir aider des gens qui en ont besoin.

Le point négatif, c’est le côté un peu glauque des locaux d’accueil du CECOS, à l’époque.

  • La levée de l’anonymat des donneurs et donneuses de gamètes et des couples donneurs d’embryons, tu en pense quoi?

J’estime que la première étape logique et normale (au 21° siècle) serait de demander leur avis aux donneurs. En effet, je n’ai personnellement aucun problème avec la levée de l’anonymat si cela peut aider les personnes nées de ces dons. Si l’on donne, c’est par altruisme. Donc, si la levée de l’anonymat peut aider, il y a de fortes chances que l’on soit pour. Mais en France, on nous infantilise facilement et on décide pour nous plutôt que de nous demander notre avis.

  • En France, les candidats au don de spermatozoïdes sont peu nombreux,
    qu’est-ce qui, selon toi pourrait contribuer à motiver les hommes à se présenter dans les Cecos pour faire un don?

L’information, l’information, l’information. En effet, je pense qu’une bonne campagne d’information (conditions, lieux…) inciterai déjà pas mal d’hommes qui ne connaissent pas le processus à se présenter auprès des CECOS. Après, j’espère que les lieux sont plus sympa qu’à l’époque. Sinon, il faut les améliorer.

  • Inciterais-tu des hommes de ton entourage à faire un don de spermatozoïdes? Si oui, pourquoi? Si non, pourquoi?

Oui, bien sûr! Pourquoi ? Tout simplement parce que c’est utile. A-t-on besoin d’autres raisons ?

• Pour terminer, as-tu quelque chose à ajouter? Une anecdote à nous faire partager?

Une anecdote, non. Je mentionnais la nécessité de faire de l’information. Elle est primordiale car je constate encore aujourd’hui que peu d’hommes connaissent la vasectomie ou alors, ils en ont une idée totalement fausse. Dans le même genre, je pense que le don de spermatozoïdes, comme tout ce qui est du domaine du « sexe », reste un peu tabou.

Christian BORTOLUZZI.

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Il est à noter que Christian a été donneur de gamètes dans le cadre d’une démarche de vasectomie. Une démarche que nous saluons car la vasectomie est une méthode de contraception masculine encore trop peu connue malgré son efficacité. 

Parce que ce sujet, comme le don de spermatozoïdes est encore trop peu connu du grand public, nous vous proposons un article du site LCI.fr du 22 février 2019:

https://www.lci.fr/bien-etre/sterilisation-de-plus-en-plus-de-vasectomies-en-france-le-nombre-d-hommes-ayant-recours-a-ce-moyen-de-contraception-a-double-en-4-ans-2112843.html

Dans son témoignage Christian insiste, et à juste titre sur le manque d’information en France à propos du don de gamètes et notamment du don de spermatozoïdes. Un manque d’information qui ne favorise pas le recrutement de candidats au don. Aussi, il nous parait utile de vous informer sur l’organisation du don de spermatozoïdes et quelles sont les démarches à suivre si vous souhaitez un jour être donneur. Lire l’article >